Le Shakuhachi
Jeu
Jeu
La maitrise du souffle reste un élément essentiel de la pratique et, même si on arrive à produire un son relativement rapidement, on peut passer le restant de sa vie à améliorer ce son.
C’est pourquoi, traditionnellement, toute pratique du Shakuhachi débute par le Ro Buki ; littéralement « souffler le Ro » (Ro étant la note la plus grave de l’instrument; tous les trous bouchés).
Lors du Ro Buki, on fait des expirations les plus longues possible en portant son attention sur le son et la relâche des muscles.
De manière générale, pratiquer des notes tenues le plus longtemps possible est un bon exercice car instinctivement, le corps va trouver les meilleurs postures pour « rentabiliser » le souffle et ne pas s’épuiser.
Le Shakuhachi est une flute pentatonique;
Avec ses 5 trous, elle produit 5 notes pour une octave :
(dans l’alphabet Katakana japonais)
Ces notes principales sont altérées à l’aide de différentes techniques (ouvertures partielles de trous – altérations à l’embouchure – doigtés de fourches) afin d’obtenir toutes les autres notes (les 12 demi-tons) ainsi que des modulations fines (micro-tons).
La gamme chromatique correspond alors à :
Ro – Tsu no meri – Tsu no chu meri – Tsu – Re no chu meri – Re – U (Chi no meri) – Chi – Ri no meri – Ri no chu meri – Ri – Ro no meri
où le terme Meri (de Meru : « abaisser ») désigne une note diminuée (parfois d’un demi-ton, parfois d’un ton)
en Katakana, Meri est écrit avec simplement le caractère Me : メ et Chu meri avec le Kanji Chu : 中)
ロ – ツメ – ツ中 – ツ – レ中 – レ – ウ – チ – リメ – リ中 – リ – ロメ
Le Shakuhachi joue sur trois octaves :
Comme il existe différentes notations selon les écoles (Ryu) de Shakuhachi, les tablatures (noms des notes et doigtés) diffèrent.
Vous noterez que certaines notes n’ont pas le même nom et/ou le même doigté lorsqu’elle sont jouées dans le registre grave ou aigüe.
Vous pourrez trouver encore d’autre tablatures sur cette page du site de l’ESS (European Shakuhachi Society)
Mais l’on distingue essentiellement deux modes principaux.
On parle souvent en musique Japonaise des modes Insenpo et Yosenpo (Senpo 旋法 : mode musical)
Elles ne contiennent pas d’intervalles d’un demi-ton contrairement aux gammes « In« . On les juge plus brillantes ou joyeuses.
Les gammes Yosenpo viennent des musiques étrangères (Chine, Corée, Indonésie).
quelques exemples :
Min’yõ : La gamme de base (pentatonique mineure) utilisée dans la musique Folk; elle vient de la musique Chinoise.
intervalles : 11/2 – 1 – 1 – 11/2 – 1 (ex: Ré, Fa, Sol, La, Do, Ré)
soit : ロ, ツ, レ, チ, リ, ロ
Ritsu : (aussi appelée Yosenpo) gamme commune au Gagaku et Shōmyō
intervalles : 1 – 11/2 – 1 – 1 – 11/2 (ex : Ré, Mi, Sol, La, Si, Ré)
Soit : ロ, ツ中, レ, チ, リ中, ロ
Ryūkyū : Gamme jouée dans l’archipel du sud Amami et Okinawa venue d’Indonésie.
intervalles : 2 – 1/2 – 1 – 2 – 1/2 (ex : Ré, Fa#, Sol, La, Do#, Ré)
soit : ロ,レ中, チ, ロメ, ロ
Ryo : Intervalles : 1 – 1 – 11/2 – 1 – 11/2 (ex : Ré, Mi, Fa#, La, Si, Ré)
soit : ロ, ツ中, レ中, チ, リ中, ロ
Les gammes dites « In » sont typiques de la musique Japonaise.
Elles se remarquent par la présence d’intervalles d’un demi-ton; On les trouve plus sombres et mélancoliques.
Elles ont souvent un motif ascendant et descendant différents.
Miyako Bushi :
intervalles : 1 – 1/2 – 1 – 1 – 1/2 – 11/2 (ex : Ré, Mib, Sol, La, Sib, Ré)
soit : ロ, ツメ, レ, チ, リメ, ロ
Les doigtés deviennent alors difficiles à intégrer car nombreux malgré que la flute ne possède que 5 trous.
En effet, il existe pour certaines notes plusieurs doigtés qui, par leurs timbres différents, enrichissent la palette d’expression.
Les doigts, dans le jeu du shakuhachi servent à des attaques, des altérations, des glissés, des trilles…
Toutes sortes de doigtés ou enchainements de doigtés spécifiques utilisent des effets d’harmoniques ou résonances ‘étranges’ pour produire des couleurs musicales très particulières.
On trouve ainsi des motifs typiques comme Ha-Ra-Ro , Korokoro…
Ce sont des attaques de notes avec les doigts.
Elles servent à articuler des répétitions de notes (Okuri)
Il en existe 2 types :
Pour chaque note, un doigt est assujetti à chaque type d’attaque.
ex : pour la note レ (Re) on utilise le 3ème ou 4ème doigt pour les attaques Oshi : 3-Oshi et 4-Oshi
et le 1er ou le 2ème doigt pour les attaques Uchi : 1-Uchi et 2-Uchi
Dans les partitions Kinko, une répétition en Oshi est noté avec une simple virgule horizontale et en Uchi, elle es notée ル (Ru)
Cette liberté, déroutante au début, une fois maitrisée, permet des altérations microtonales très fines.
On peut, varier la hauteur d’une note au niveau de l’embouchure en maitrisant l’angle du souffle sur le biseau de différentes manières :
Les techniques visant à abaisser (Meri) ou monter (Kari) la hauteur de la note se combine pour donner une grande variété d’effets.
(si l’on devait faire un parallèle avec la musique occidentale, on pourrait assimiler Meri au Bémol (♭) mais Kari correspondrait en fait plus au Bécarre (♮) qu’au Dièse (#)
Il existe un certain nombre de techniques précises permettant d’abaisser, de monter et de combiner ces deux effets sur la hauteur de la note.
On trouve notamment les Meri-komi, Ori-keshi, Suri-age, Nayashi …
Les vibratos sont effectués au shakuhachi presque uniquement avec des mouvements de tête variant l’angle de souffle à l’embouchure.
Il en existe principalement 3 types :
Certains maitres prétendent qu’ils faut plusieurs années de pratique avant de bien maitriser les Yuri !
Il est intéressant de noter que, malgré un usage très recherché de toutes les techniques possibles, il est proscrit (du moins dans le style de l’école de Kinko) de faire des attaques avec la langue.
Seule une technique de roulement (Tama Ne 玉音) utilise la langue pour modifier le son.
Je ne présente ici que les techniques de l’école de Kinko, de la branche Chikumeisha transmise par mon maitre Gunnar Jinmei Linder qui les a particulièrement détaillées dans un ouvrage que je recommande (cf « sources »).
La difficulté principale réside dans les combinaisons complexes de toutes ces différentes techniques ornementales sachant que dans le répertoire de Kinko Honkyoku, la plupart de ces ornements ne sont pas notés; ils doivent être connu du joueur par le biais de la transmission de maitre à élève…
Il existe principalement deux écoles de Shakuhachi :
KSK – Kokusai Shakuhachi Kenshūkan : Aussi appelée Chikushinkai (竹心会), c’est l’école moderne crée par Yokoyama Katsuya, un des grnads joueurs de Shakuhachi du XXè siècle; formé au style Kinko ainsi que par Watasumi Doso et ancré dans la tradition spirituelle de l’instrument. (site KSK Europe)
Myōan: Un ensemble d’écoles découlant directement de la secte Fuke; elles ont cherché à conserver l’enseignement spirituel bouddhiste du Shakuhachi à la dissolution de la secte. (Itchoken, Shimpo ryu, Nesaza Ha, Taizan Ha…)
Dokyoku : formé par les pièces enseignées par Watazumi Doso Roshi, moine zen de l’école Rinzai jouant plus particulièrement la flute Hocchiku et intégrant sa pratique du Shakuhachi dans une voie de développement qu’il nomme Watasumido.
Hijiri Kaï : École récente de Teruhisa Fukuda aussi appelée « Sainte école » dont la plupart des élèves sont formés par Daniel Lifermann à Paris (Association « La voie du bambou« )
Chikuho : Fondée en 1917 par Sakai Chikuho I
et bien d’autres….
(liste plus exhaustive sur le site de l’European Shakuhachi Society)
L’écriture de la musique du Japonaise est d’une richesse incroyable.
Il existe quasiment autant de types de notations qu’il y a d’instruments et d’écoles de chaque instrument !
De manière générale, la musique est traditionnellement notée au Japon en ligne verticales lues de haut en bas et de droite à gauche.
Le notes y sont écrites par le caractère désignant leur nom ; la notation du rythme et des ornements est souvent assez visuelle.
Dans le cas du Shakuhachi, il existe différentes notations les plus importantes étant la notation Kinko et celle de Tozan.
Le rythme est noté par des ‘virgules’ de part et d’autre de la ligne indiquant temps et contre-temps.
Les ornements sont exprimés par de symboles figurant les variations de hauteur de notes.
Voici différents exemples de notations :